Surimpressions
Beau comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d’une machine à coudre et d’un parapluie.
Isidore Ducasse, dit comte de Lautréamont (Les chants de Maldoror 1869)
On dit souvent que les inventions naissent d’une erreur. Un jour, j’ai réexposé un rouleau de pellicule que mon assistante avait déjà exposé et mal rembobiné. Se superposaient des images de corrida avec des jeunes gens dans la campagne. Aussitôt le précepte de Lautréamont me vint à l’esprit. Cela évoquait les rencontres insolites du surréalisme dans sa tradition la plus pure : l’écriture automatique…
J’abandonnais le Polaroïd pour retrouver mes appareils Minolta et je conçus des ensembles ou séquences… Mais ce qui a surtout compté pour moi, ce fut le Retable de Grünewald à Colmar. Le conservateur du musée m’avait demandé un travail sur cette œuvre majeure de l’histoire de la peinture. Le personnage de Saint Antoine en proie à ses délires et aux monstres qui le harcèlent pour le punir de ses visons lubriques m’est revenu en mémoire bien des années plus tard. Il est aujourd’hui le moteur d’une suite de surimpressions très iconoclastes qui me mèneront je ne sais où.
Lucien Clergue, 2007